Comment calculer le délai de 3 mois à compter du jugement d’ouverture pour constater la résiliation du bail commercial à raison du défaut de paiement des loyers et charges par un preneur en liquidation judiciaire ?
On sait que, sur le fondement des dispositions des articles L.622-14 et L.641-12 du Code de commerce, lorsqu’un bailleur souhaite demander ou faire constater la résiliation du bail commercial à raison du « défaut de paiement des loyers et charges » par un preneur placé en liquidation judiciaire, son action ne peut être engagée qu’au terme d’un délai de 3 mois à compter du « jugement d’ouverture ».
Dans un arrêt de rejet très intéressant de la chambre commerciale en date du 18 janvier 2023, pour apprécier le point de départ du fameux délai de trois mois aux termes duquel le bailleur peut solliciter la résiliation du bail, la Cour de cassation fait la distinction entre :
- la liquidation issue de la conversion du plan de redressement,
- et celle faisant suite à la résolution du plan de redressement
Dans le premier cas (liquidation issue de la conversion du plan), le délai se calcule à partir de la date du jugement d’ouverture du redressement judiciaire.
Dans le deuxième cas (jugement prononçant la résolution du plan et liquidation), le délai part du jugement prononçant cette liquidation car il s’agit alors « d’une nouvelle procédure ».
Dans ce cas d’espèce, une société avait été mise en redressement judiciaire, puis avait bénéficié d’un plan de redressement avant que le tribunal, le 19 septembre 2019, ne prononce la résolution du plan de redressement et ouvre, à son encontre, une procédure de liquidation judiciaire.
Le 23 octobre 2019, par requête auprès du juge-commissaire, le bailleur avait alors demandé à ce que soit constatée la résiliation du bail pour non-paiement des loyers postérieurs à l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.
La Cour d’appel de Paris avait considéré que cette demande était irrecevable puisque faite moins de 3 mois après le jugement du 19 septembre 2019.
La société bailleresse s’est alors pourvue en cassation, faisait valoir que le point de départ du délai de 3 mois à retenir était la date « du jugement d’ouverture de sauvegarde ou de redressement judiciaire », dans la mesure où la liquidation était, de son point de vue, le prolongement de la procédure de redressement.
La Cour de cassation rejette et décide que « Lorsque la liquidation judiciaire est ouverte sur résolution du plan, il ne s’agit pas d’une conversion de la procédure de redressement en cours, mais d’une nouvelle procédure collective, de sorte que, dans cette hypothèse, le point de départ du délai de trois mois est la date du jugement prononçant la résolution du plan et ouvrant la liquidation judiciaire »