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Clause d’indexation dans les baux commerciaux

Clause d’indexation « tunnel » dans les baux commerciaux

La Clause Tunnel : quèsaco ??

La réflexion de cet article est issue de la lecture de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 7 décembre dernier qui est venu réputer non écrite une clause d’indexation dans un bail commercial, dont je peux lire à droite et à gauche qu’elle serait une clause tunnel…et que la CA serait ainsi venue considérer que les clauses tunnel seraient illicites…

Avignonnaise et fière de l’être, j’ai utilisé Quèsaco qui ça signifie « qu’est-ce que cela ? » en patois provençal 😊. Et aujourd’hui en fait de pont (d’Avignon) je voudrais aborder les clauses tunnel et ces clauses d’indexation un peu particulières que l’on peut trouver en baux commerciaux

Précision sur la clause d’indexation analysée par l’arrêt du 7 décembre 2023

Pour mieux apercevoir le soleil au bout du tunnel, je mets de côté la problématique de cette affaire liée au fait que la période de variation indiciaire ne coïncidait pas avec la période d’indexation, pour me focaliser sur le mécanisme d’indexation en lui-même qui vaudrait à cette clause le qualificatif de « clause tunnel » par certains.

Il faut dire que les parties elles-mêmes avaient qualifié la clause ainsi et l’on pouvait ainsi lire dans un avenant au bail :

« Le bailleur consent au preneur la mise en place d’un « tunnel » dont la prise d’effet interviendra rétroactivement à compter du 1er janvier 2009.

C’est ainsi que les parties conviennent de modérer les effets de l’application de la clause d ‘échelle mobile prévue au bail du 31 décembre 2003 dans un « tunnel » ayant pour plancher minimum 1,5% (un et demi pour cent) et pour plafond 3,5% (trois et demi pour cent). Il en résulte que l’actualisation du montant du loyer sera celle résultant de l’application de ladite clause avec un minimum de révision fixé à 1,5% et un maximum à 3,5%. ».

Et la CA de Paris de juger sur ce point que :

« Contrairement à ce qu’affirme le bailleur sans le démontrer, c’est par motifs pertinents auxquels la cour renvoie que le premier juge a considéré que la clause litigieuse en ce qu’elle exclut la réciprocité de la variation, l’actualisation du loyer emportant a minima + 1,5 %, le loyer ne peut être révisé qu’à la hausse. Or, le propre d’une clause d’échelle mobile étant de faire varier à la hausse et à la baisse le loyer, la clause qui exclut, en cas de baisse de l’indice, l’ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l’indice publié dans le même temps écarte toute réciprocité de variation, et fausse ainsi le jeu normal de l’indexation. ».

☀️ Cette clause en effet ne joue dans les faits qu’à la hausse, il est donc normal qu’elle ait été jugée comme illicite.

Une clause d’indexation ne peut pas jouer qu’à la hausse

Au demeurant, rien de neuf sous le soleil juridique, la CA de Paris ayant déjà jugé la même chose par le passé. Et avec une motivation très proche en 2016 pour une clause d’indexation rédigée de la manière quasi identique (CA Paris 20 janvier 2016, RG n°13/21626).

❓Ma question : cette clause était-elle bien une clause tunnel en dépit de la qualification donnée par les parties ?

Pas pour moi en tous les cas !

Alors comment bien rédiger sa clause d’indexation « tunnel » dans les baux commerciaux ?

Pour moi, une véritable clause tunnel, cela serait la clause qui prévoirait que l’indexation ne peut varier à la hausse et à la baisse que dans une limite de 2,5 % par exemple. Il me semble alors qu’une telle clause – qui n’écarterait pas le jeu de la réciprocité dans le calcul de l’indexation mais se contenterait de limiter la variation – pourrait être considérée comme valable.

Il me semble que nous aurions alors un vrai tunnel qui fonctionne dans les deux sens et dans les mêmes proportions et qui ralentit seulement l’atteinte du seuil des 25% visé par l’article L.145-39 du Code de commerce.

Mon conseil aux bailleurs qui veulent insérer des clauses d’indexation dans leur baux commerciaux :

Pensez que vous pouvez aussi tenter d’insérer dans vos baux des clauses prévoyant que le loyer augmentera forfaitairement chaque année de x % (je l’ai vu notamment dans des baux d’EHPAD) et que ces clauses ne sont pas considérées comme des clauses d’indexation. 

Et cela a été également rappelé récemment dans un arrêt de la Cour de cassation du 22 juin 2022, n°21-16.042.

Et pour terminer ce post, car les filles du Sud sont sympas, voici le lien de l’arrêt de la CA du 7 décembre 2023 sur le site de « Pappers justice ».

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